22 Avril 2017
Samedi après-midi nous partons chez nous, en Ardèche, puisque c’est toujours là-haut que nous votons.
Une bien étrange campagne présidentielle va connaître demain sa première étape avec le premier tour qui désignera les deux finalistes.
Jeudi soir, on nous présenta l’attentat de l’avenue des Champs-Elysées, comme un acte terroriste commandité par Daech … mais, quelques heures plus tard, et après des « reportages » en boucle pour accréditer cette idée, le criminel apparaît plutôt comme un homme isolé rongé par une haine personnelle des forces de l’ordre. Sans réfléchir plus, tous les candidats à l’élection présidentielle, tétanisés par l’idée d’être moins fermes et résolus que les dix autres, y allèrent de leurs déclarations … dont aucune n’envisagea qu’il puisse s’agir de l’acte d’un fou qui allait au-devant de la mort après l’avoir portée.
Nous allons faire un acte collectivement et individuellement important en exprimant quel avenir nous choisissons parmi onze visions différentes. Soyons capables de choisir autrement que sous le coup de l’émotion légitime devant la mort si injuste d’un gardien de la paix.
Du coup, en ce samedi matin, alors que la campagne électorale est terminée, c’est un poème de Robert DESNOS, écrit en 1942, qui m’est apparu le mieux correspondre à mes sentiments.
Demain
Âgé de cent mille ans, j’aurais encor la force
De t’attendre, ô demain pressenti par l’espoir.
Le temps, vieillard souffrant de multiples entorses,
Peut gémir : Le matin est neuf, neuf est le soir.
Mais depuis trop de mois nous vivons à la veille,
Nous veillons, nous gardons la lumière et le feu,
Nous parlons à voix basse et nous tendons l’oreille
À maint bruit vite éteint et perdu comme au jeu.
Or, du fond de la nuit, nous témoignons encore
De la splendeur du jour et de tous ses présents.
Si nous ne dormons pas c’est pour guetter l’aurore
Qui prouvera qu’enfin nous vivons au présent.
C’est au présent qu’il nous faut vivre en nous projetant dans l’avenir, car nous le devons à nos enfants et petits-enfants. Robert DESNOS avait eu la force d’écrire cela, en pleine guerre, et alors qu’il mourut du typhus au camp de Theresienstadt trois ans plus tard sans connaître vraiment la fin du nazisme. Dans un contexte infiniment moins dramatique, montrons que nous croyons encore en un avenir positif et sachons le faire arriver en refusant tous les discours de haine.
Jean-Paul BOURGЀS 22 avril 2017