Algérie … déni ou absurde contrition

20 Mars 2025

Le printemps vient de commencer et l’explosion de fleurs un peu partout en France ne peut que nous inviter à tourner notre esprit vers la notion de redémarrage sur des bases nouvelles et dans la joie.
Hélas la fin de l’hiver fut marquée par un climat revanchard tourné vers l’exclusion de tout ce qui nous est extérieur, comme on le voit avec ce président des Etats-Unis qui, par des taxes dissuasives, veut empêcher ses compatriotes de boire du Champagne, et envisage froidement d’envahir le Groenland pour s’emparer de ses ressources minières.
Nous n’avons pas échappé à ce tourbillon fait de détestation et d’ignorance … et des ministres émoustillés par la progression des idées d’extrême-droite cherchent, par tous les moyens, à rouvrir les plaies résultant de la séparation des destins de la France et de l’Algérie, il y a soixante-trois ans.
Les propos factuels de Jean-Michel APHATIE, assimilant les crimes contre l’humanité commis par l’armée française à ce que les Nazis firent à Oradour-sur-Glane, réveillèrent le déni national sur ce que fut … et est toujours … une conquête coloniale ( Cette odieuse apathie - Jean-Paul-69-07.over-blog.com ).
Mon grand-père, Auguste BOURGÈS, quitta sa Corrèze natale à 16 ans en 1882 pour l’Algérie car il estimait ne pas avoir d’avenir en France. Il fit partie, sans en avoir probablement conscience, de cette « colonisation de peuplement » qui se conclut 80 ans plus tard par l’exode de la plus grande partie de ceux qu’on appela « les Pieds Noirs ». Il se maria à Alger avec Lucie PINARD, dont les parents étaient arrivés à Alger à la suite de la défaite de 1870 et qui avaient ouvert une petite bijouterie dans le bas de la casbah. Auguste BOURGÈS devint alors un Africain pour le reste de sa longue vie, en Algérie puis à Tanger, où il repose pour toujours.

La tombe de mon arrière-grand-père, Ferdinand PINARD, à Alger

Aucun de ceux qui se rendirent en Algérie, comme de ceux qui revinrent, ayant tout perdu, en 1962, comme de ceux qui, depuis, vinrent travailler dans nos usines et s’installèrent durablement en France, n’a à porter le poids d’un passé qui est ce qu’il fut … et la contrition ne doit avoir aucune place dans notre vie.
J’ai déjà expliqué que j’ai fait ma scolarité, du CM2 à Mathélem, au lycée international de Saint Germain-en-Laye. Mon autre grand-père, Toussaint ALIZARD, était mort à la tête de sa compagnie en décembre 1914 et papa fut longtemps recherché par la Gestapo au moment de ma naissance. C’est dire qu’à la maison, quand j’étais un petit garçon, l’Allemagne n’avait pas franchement la cote. Pourtant, à partir de 1956 je vis arriver dans ma classe des camarades Allemands … et j’appris, pour toujours, que la haine historique est un non-sens.
Mais il est aussi stupide d’oublier le passé en pratiquant le déni que de ressasser les blessures du passé en refusant de se tourner ensemble vers l’avenir. Le général DE GAULLE l’avait parfaitement compris en fondant l’amitié franco-allemande après avoir été celui qui n’avait jamais cessé de tenir bon face à l’Allemagne-nazie.
J’aimerais voir les autorités françaises réagir vigoureusement pour nous tourner tous vers le futur sans, pour autant, passer un coup de chiffon sur les horreurs commises. On ne bâtit rien de solide sur le mensonge … or nous avons besoin de choses solides, des deux côtés de la Méditerranée.

Jean-Paul BOURGÈS 21 mars 2025